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Six mois avec Maison de la Gare















L'expérience de la volontaire suédoise Frida Ingemarsson


« Il y a un peu plus d'un an, j'ai eu l'idée la plus folle. Je me suis dit: "Allons en Afrique; ça semble une idée excitante!” Eh oui, ce fut excitant. J’ai trouvé Maison de la Gare grâce à un ami de ma sœur, un ancien volontaire. Je ne savais presque rien du Sénégal ou des talibés. Tout ce que je savais, c'était que je voulais aller quelque part où l'on parle français. Je voulais vivre une vraie aventure, l’expérience d’un style de vie complètement différent ; j'ai donc signé pour un séjour de six mois à Saint-Louis.

Trois nuits avant mon départ, j'étais tellement nerveuse que je n’ai pu fermer l’œil. Je n’avais pas la moindre idée de ce qui m’attendait ni comment j’allais pouvoir communiquer avec les gens. J’avais étudié le français à l'école, mais c'était il y a longtemps et mes connaissances étaient affreusement élémentaires. J'avais voyagé et vécu dans des pays étrangers avant, mais ce n’était rien de comparable. Ce serait l'aventure de ma vie. Pour être honnête, les raisons pour lesquelles je voulais aller comme volontaire étaient, à la base, égoïstes. J’ai pensé que ce serait une bonne façon de découvrir un pays à partir de l'intérieur et j’espérais que l'expérience m’amène à voir ma propre vie sous un jour différent. Je n’ai pas de formation en enseignement ni en soins infirmiers et je ne connais rien en jardinage. Tout ce que j’ai, c'est un grand cœur, ouvert et curieux, et je voulais en faire le meilleur usage possible.

Pendant mes premières semaines au Sénégal, je me percevais et me sentais constamment comme un grand point d'interrogation. Je ne comprenais pas ce que les gens disaient et les rares fois où je comprenais, le contexte culturel me confondait tout autant. Je me sentais comme un bébé dans presque tous les aspects de la vie. Je ne savais pas comment manger et comment me comporter autour de l'immense bol de thiéboudienne (bien que délicieuse!). J'ai accidentellement insulté ma mère d'accueil une fois, en essayant de plaisanter. J’étais totalement incapable de laver mon linge à la main et je devais toujours demander de l'aide. Et j'étais trop terrifiée pour aller où que ce soit, même à proximité du marché. Je me sentais comme un nouveau-né qui avait besoin d'aide et de surveillance constante. Je pensais ne pas pouvoir survivre pendant ces six mois.

Mais les gens étaient gentils avec moi. Ma famille d'accueil s'est appliquée à me transformer le plus possible en Sénégalaise et, petit pas par petit pas, je faisais des progrès. Au Sénégal, il est facile de se faire des amis et bientôt tous les gens du quartier me reconnaissaient et me saluaient chaque fois que je passais devant eux. Abdoul, qui tenait le petit kiosque juste passé le coin de rue, pointait un à un chacun des produits qu'il vendait, prononçant leurs noms en langue Wolof. La fois suivante où je me suis présentée, il a mis mes connaissances à l’épreuve. Il m'a alors dit qu'il était important que j'apprenne le Wolof pour que nous puissions nous marier, une déclaration (pas une question!). Je suis vite devenue très habile à répondre à ce genre d'offre, comme doivent l’être toutes les volontaires féminines.

Ma « sœur » dans ma famille d'accueil, Penda, m'a amenée rendre visite à ses amis et, bien que je ne puisse rien dire, ils semblaient en quelque sorte apprécier ma présence. C'est une des choses que j'aime du Sénégal. Les gens aiment vous avoir avec eux, pour savoir si vous allez bien. Ma mère d'accueil m'a dit lors de mon premier jour dans sa maison qu'elle me traiterait comme l’une des siennes, et elle l'a vraiment fait. Avoir quelqu'un qui se soucie de vous à ce point, quelqu'un avec qui vous n’aviez aucun lien antérieur, c'est tout simplement incroyable. Elle a fait coudre des robes pour moi, elle m'a amenée à différents endroits et veillait toujours à ce que je sois heureuse et que je n'aie pas faim. J’ai vraiment eu la chance de participer à la vie d'une telle famille sénégalaise. Pendant les six mois que j'ai passés là-bas, ma famille a célébré un mariage, une cérémonie de circoncision ainsi que le baptême du bébé de ma sœur-hôte pour qui j’ai été choisi marraine (!).

Mais bien que j’aie vraiment aimé ma famille d'accueil, mon endroit préféré à Saint-Louis était chez Maison de la Gare. Même si au début je ne pouvais pas parler à personne, les talibés étaient là et ils ne se souciaient pas de ça parce que nous pouvions tout de même jouer. J’ai réalisé que ce sont EUX qui ont aidé MOI. Ce sont eux qui m'ont fait voir non seulement le Sénégal, mais ce qui est important dans la vie. Lors des jours difficiles, ce sont eux qui me rappelaient de sourire et qui me faisaient rire. Je repense aux moments précieux quand je pouvais m’asseoir avec Arouna et discuter de la politique sénégalaise ou plaisanter avec Moussa lui disant qu'il pourrait être un modèle pour le mascara (les cils!) ou voir rougir Mamadou quand je lui demandais comment il s’en tirait avec les filles. Des moments comme ceux-là sont si précieux parce que nous ne sommes que des humains et sommes tous égaux.

Les liens que j’ai pu tisser avec ces enfants sont parmi les plus belles choses de ma vie et pas un jour ne passe sans que je n’aie une pensée pour eux. Quand j'étais à Maison de la Gare, j’ai vu beaucoup de choses terribles. J'ai vu comment ces enfants vivent, comment ils grandissent et le peu de chance qu'ils ont dans la vie. J’ai vu comment ils apprennent à se battre entre eux parce que leur marabout les bat, et j’ai vu comment leur corps souffre des démangeaisons causées par les piqûres des poux qui vivent dans leurs vêtements et là où ils dorment. Mais j'ai aussi vu beaucoup de choses merveilleuses. Comment ils prennent soin les uns des autres et s'assurent que tout le monde reçoit une tranche de pain dans la soirée. Combien ils veulent apprendre, même s'ils n’ont pas dormi ni mangé ! Comment ils deviennent heureux quand quelqu'un se soucie d'eux et quand quelqu'un les voit pour ce qu'ils sont - et non pas juste des talibés.

J’ai certainement vécu des hauts et des bas pendant mes six mois mais, grâce à la façon décontractée sénégalaise de la vie, je n’avais aucune raison de rester déprimée. Dès la première seconde de perte de confiance en moi ou de tristesse, il y a toujours eu quelqu’un pour prendre soin de moi en me taquinant pour mon mal du pays et pour m'envoyer le plus beau sourire réconfortant pour me rappeler de me concentrer sur les choses positives de la vie.

Aller au Sénégal fut la meilleure décision que je n'aie jamais prise. Cette expérience m'a fait croire encore plus dans le fait que nous sommes tout simplement des humains et nous partageons les mêmes traits de base, valeurs et objectifs dans la vie. J'ai appris à voir les choses sous un éclairage différent et j'ai appris à comprendre mes propres problèmes en les appréhendant sous un angle nouveau. J’ai eu la chance de rencontrer des gens qui savent vraiment ce que signifie le travail acharné et l'importance de celui-ci. Les gens qui sont passionnés par quelque chose et s'efforcent de contribuer au plus grand bien. Je n’ai pas de mots assez forts pour expliquer combien ils m’inspirent, et je serai éternellement reconnaissante de l'amour et de la compassion qu'ils m’ont démontrés. »