Un enfant au cœur devient un leader d'enfants

Souleymane est arrivé à Maison de la Gare en 2010 quand il avait à peu près 14 ans. Après y avoir reçu des soins quand il fut malade, il devint une présence familière au centre. Il est vite devenu évident que Souleymane, confié à un marabout de Saint-Louis par sa famille en Gambie et forcé à mendier pour un quota d'argent à un âge précoce, avait été trompé de son enfance. Chez Maison de la Gare, il a rattrapé le temps perdu. À l’adolescence, il a appris à jouer. Et il a découvert l'éducation. Maintenant, comme un talibé plus âgé ayant des responsabilités au centre et libéré de son marabout, Souleymane aide d'autres talibés à trouver leur chemin vers une vie meilleure.

Souleymane a d'abord entendu parler du centre de bouche-à-oreille par d'autres enfants talibés. Il venait de temps en temps pour obtenir un peu de nourriture et pour prendre du répit de sa mendicité quotidienne. Il développa une curiosité pour les cours. Puis, en 2011, Souleymane a commencé à avoir des problèmes dans son daara. Il est tombé malade et son marabout ne lui fournit aucun soin. Maison de la Gare a pris en charge la santé de Souleymane et il fut hospitalisé jusqu'à ce qu'il soit bien rétabli. Il était tenu de verser 600 francs (à peu près un dollar américain) à son marabout tous les jours. Même lorsqu’hospitalisé, son quota quotidien s’accumulait. Maison de la Gare est intervenue pour aider Souleymane à sortir de ces ennuis.

Une fois sa santé restaurée, Souleymane a commencé à assister régulièrement aux cours d'alphabétisation à Maison de la Gare. Son rêve était de pouvoir être enregistré à l'école formelle un jour.

Même adolescent, Souleymane avait un cœur d'enfant. Lors d'une série de célébrations organisées pour les enfants talibés au centre, Souleymane a passé des heures à colorier et à dessiner à côté des enfants ayant la moitié de son âge. Il passait autant de temps que possible à participer à tous les jeux, toujours avec les plus jeunes. Il adorait les courses de sac et apprendre le saut à corde. La possibilité de jouer les djembés a également capturé son imagination. Souleymane aime une bonne blague et il est toujours prêt à taquiner. Partout où on s’amuse, on peut toujours être sûr que Souleymane va être de la partie.

En 2015, quand le jeune Canadien Robbie Hughes, une ceinture noire de karaté de 13 ans, est arrivé avec sa famille pour aider à mettre en place un programme de karaté à Maison de la Gare, Souleymane était très intéressé. Robbie et Souleymane sont devenus de bons amis. Robbie a partagé avec lui sa passion pour le karaté, et Souleymane a enseigné Robbie à jouer aux billes et à préparer une théière parfaite d’ataya, le thé sénégalais.

Souleymane a continué à étudier le karaté au centre et au dojo Sor-Karaté. Avec ses progrès, sa discipline et son sens de responsabilités se sont accrus. Il fut un temps où on pouvait à l’occasion retrouver Souleymane prenant une sieste derrière un étal du marché en lieu d’être à l'heure pour sa classe. Mais maintenant, la discipline du karaté et sa fierté face à ses responsabilités semblent avoir eu un effet transformateur. Souleymane mène l'échauffement pour la classe de karaté au centre deux fois par semaine, et il s’entraîne au dojo la plupart des soirs. Il aide à orienter les nouveaux talibés inscrits au dojo dans le programme de karaté, s’assurant qu'ils soient à l’heure. Et il aide les enfants débutants à trouver un gi (le kimono de karaté) qui leur convient. Il participe également en compétitions en kata et en combat pour son dojo. Souleymane a trouvé la passion et le leadership dans le karaté.

Pendant que Souleymane fait la transition de la vie talibé, il continue à travailler avec Maison de la Gare, non seulement menant les classes de karaté mais contribuant au projet d'hygiène et de soins de santé. La plupart du temps, c'est lui qui organise le brossage des dents pour les enfants talibés. Parmi d’autres projets, Souleymane s’occupe d’un groupe de quatre jeunes talibés qui cultivent une parcelle de gombo dans le terrain agricole de Maison de la Gare à Bango.

Et pendant tout ce temps, Souleymane a à cœur de progresser dans son éducation, assistant fidèlement aux cours à Maison de la Gare. Et, s’il y a du plaisir à y avoir, Souleymane ne sera pas loin.